[SSL] Rencontre avec Ivan Herceg à l'Olympia commenter news la boite noire du musicien


Publié: 18 février 2022

À l'occasion du concert de Louis Chedid à l'Olympia, nous avons eu le privilège d'interroger l'ingénieur du son Ivan Herceg qui utilise une console Solid State Logic L100.

 

Pouvez-vous vous présenter ?



 

Ivan pendant le soundcheck.

Je m’appelle Ivan Herceg et je suis ingénieur du son. J'ai fait des études d’architecture mais étant un passionné de musique et de technique, je me suis lancé dans la production musicale en studio à la fin de mon cursus universitaire.

Le live a suivi, dans un premier temps avec des groupes que j'avais enregistrés en studio, puis au fil des rencontres, avec bien d'autres. On était pile à l'époque de la grande transition des consoles analogiques vers les consoles numériques, j'ai donc dû apprendre à maîtriser les unes et les autres. Par la suite, les tournées ont pris le dessus sur l'activité studio et actuellement, le live occupe une majeure partie de mon temps.

Je suis, depuis quelques années, intervenant régulier dans des organismes comme l'INA et le CFPTS, sur des formations à destination des apprentis régisseurs son ou d’élèves post BTS (diplôme d’ingénierie sonore). C'est vraiment très enrichissant de transmettre ses acquis et d'échanger avec la nouvelle génération. Ils sont vifs, comprennent vite et surtout ont déjà un gros bagage de connaissances théoriques et pratiques.

 

Quels étaient vos besoins pour cette tournée ?

Pour cette tournée, nous allions jouer dans beaucoup de théâtres et je voulais une console à encombrement réduit. L'idée était également que tous les stage racks soient disposés sur le plateau, le plus proche possible des sources, pour éviter les sous-patchs et autres multipaires. 
 

La console SSL L100 positionnée en façade.


Pourquoi avoir choisi une console SSL ?

J'ai commencé à utiliser les consoles SSL Live en 2016, pendant la troisième tournée de Lilly Wood & The Prick. J'avais découvert la série Live un an après sa sortie lors d'un salon à Paris et c'est à cette occasion que j'ai pu la prendre en main, au casque, dans les conditions que l'on imagine sur un salon. Clarté, profondeur et EQ très musicaux, j'ai entendu des détails que je n'entendais pas habituellement sur les autres consoles numériques et cela m'avait vraiment intrigué. Nous avons eu la chance d'emmener un modèle L300 pour la façade (et une L500 en monitor) sur cette tournée Lilly Wood. Tous les soirs, j’étais littéralement estomaqué par le rendu sonore ! À cette époque, nous étions très peu à tourner avec des SSL et le logiciel était encore en pleine évolution. Chaque mise à jour apportait son lot de nouvelles fonctionnalités très utiles, c'était excitant. Aujourd'hui, l'OS est très abouti et c'est un vrai plaisir à l'usage. 

Je dirais donc que le choix d'une SSL était logique suite aux différentes expériences passées en tournée avec des modèles L200, L300 et L500. Pour cette tournée avec Louis Chedid, la petite L100 s'est avérée être le choix idéal.

 

En quoi les consoles Solid State Logic répondent-elles le mieux à vos besoins ?

Les modèles Live sont plus que des consoles de mixage, ce sont vraiment des outils de production musicale. Il est possible de faire des choses très pointues et très produites, de se rapprocher du son et de l'esprit des albums. Aussi, par leur incroyable dynamique et la qualité de leur moteur audio, elles sont autant à l'aise sur un titre dense avec un arrangement riche que sur des titres très intimistes, ou l'émotion règne. La partie automation est redoutable tout en restant facile d'accès, et bien que j'ai opté pour quelques périphériques externes, la console aurait très bien pu se suffire à elle-même.

Le but était aussi de répondre aux demandes qui sont parfois complexes et qu'il faut pouvoir immédiatement satisfaire. Louis est un artiste qui maîtrise parfaitement le matériel de production studio, il sait ce qu'il veut entendre et il faut vite arriver à un résultat probant. Le concept de Stems, que l'on peut router vers d'autres Stems mais aussi envoyer vers des Aux, sont les armes fatales pour répondre à ce genre de demandes. Cela ouvre vraiment les champs du possible, combiné à l'automation, il n'y a quasiment plus de limites. Et bien que très puissant, cela reste très simple à mettre en œuvre.

Évidemment, il y a la fiabilité et l'exceptionnelle qualité audio que l’on ne remet pas en question. 

 

Quelle a été la configuration retenue ?

Nous avons opté pour un stage rack SB32.24 côté cour, un convertisseur Focusrite RedNet A16R côté jardin, la console SSL L100 en façade et une console retour. Le tout passe par un switch ethernet/fibre pour récupérer et partager les flux Dante. Cette configuration nous a permis d'optimiser les longueurs de liaisons entre les sources et nos stage racks. Pour les claviers, j'utilise des symétriseurs Radial J+4, à alimentation externe, qui attaquent les entrées du RedNet en niveau ligne. Un son "in the face" et zéro bruit de fond ! Pour la partie claviers VST, après comparaison, nous avons choisi de rester uniquement en numérique, en rentrant directement en AES dans le RedNet.
 

 

 

Quelle est votre approche de mixage sur cette tournée ?

C'est un concert dans lequel on rencontre des styles assez différents, révélateurs de l'éclectisme musical incroyable de Louis en ses plus de 40 ans de carrière. Certains titres, parus dans les années 80, sont très produits, avec une dominance de synthés analogiques et des effets bien marqués sur les voix. Il y a également d’autres morceaux plus bruts avec des solos typés rock, puis d'un coup, on va basculer dans un univers jazz intimiste. On revient ensuite dans la pop esprit 70's, c'est vraiment très riche et c'est également un bon challenge côté mixage.

Louis joue avec d'excellents musiciens et certaines parties du spectacle sont très libres, ce n’est pas du tout un show timecodé avec des structures figées. J'essaie alors de garder un mix dynamique et vivant, pour mettre en avant l'énergie mais également retranscrire au mieux le côté intime de certaines chansons.

Dans ce show, j’utilise un Snapshot par titre, mais je fais énormément de suivis, des envois ponctuels d'effets, etcetera ... 

 

   

Ci-dessus, le SB32.24 de Solid State Logic et la RedNet A16R de Focusrite.

 

Quels plugins utilisez-vous ?

J'utilise exclusivement ceux présents dans le système interne de la console SSL. Ces plugins sont excellents, j'utilise beaucoup le Dynamic EQ 2 ou 4 bandes, le VHD Drive mais aussi tout une série d'effets : deux delays, quatre ou cinq réverbes, un effet de Chorus et un effet de Phasing. Pour le côté pratique et pour élargir la palette de couleurs, j'ai en hardware une pédale de "Space Echo" et deux réverbes dans mon rack. Elles sont toutes les deux câblées en AES et chaque Snapshot leur envoie les Program Change en MIDI.  

J'adore les plugins mais de manière générale je suis toujours assez fan d'avoir quelques traitements externes sous la main. Ces machines analogiques sont rassurantes, "visuelles" mais elles ont surtout un vrai mojo. Je traite mon bus master avec le FUSION combiné à un compresseur limiteur stéréo à lampes (en insert sur FUSION). En second insert sur le master, vient le plug-in Bus Compressor qui émule le fameux compresseur des SSL 4000. Il est automatisé sur chaque Snapshot pour apporter une touche de compression supplémentaire sur les titres les plus calmes. 

 

Le FUSION, processeur externe stéréo analogique.

Comment adaptez-vous votre mixage aux spécificités acoustiques des différentes salles de spectacle ? Et particulièrement ce soir à l’Olympia ?

Évidemment, le mixage est grandement dépendant de l'acoustique du lieu et de la diffusion en place. Pour l'écoute des systèmes, j'utilise principalement mon Virtual Soundcheck en MADI. Ayant toujours un enregistrement du concert de la veille, je travaille avec cette base dans un premier temps, sans le son de plateau. Ça permet de résoudre quelques problèmes cruciaux avant de démarrer la balance. Je trouve cela plus pertinent que d'écouter des titres masterisés du commerce.  

L'arrivée du son de plateau induit quelques retouches mais ne change pas radicalement le mix, la plupart des corrections se faisant dans le processing du système. Le FUSION me permet aussi de peaufiner le contour grave-aigu avec le Shelv-EQ lorsque ça manque d'air ou d'assise, ou par exemple, pour resserrer l'image stéréo lorsque le système est monté trop large, le tout sans toucher au moindre paramètre de la console. Quand le mix me satisfait au point d'écoute, je me déplace dans la salle avec la tablette et l’application SSL TACO pour peaufiner les niveaux de front fills / in fills du cluster central, les EQ et les delays. 

Ce soir à l'Olympia, la configuration est en tout assis, le son ne change pas radicalement une fois le public en place. J'ai un excellent ingénieur système qui ira se balader une fois le show lancé et retouchera quelques points d'EQ au besoin. Je lui fais totalement confiance là-dessus. 

 

Avez-vous rencontré des défis techniques sur cette tournée ? Si oui, lesquels ?

Oui, c'est arrivé de temps à autre, notamment dans les lieux équipés de systèmes de diffusion un peu anciens, souvent mal amplifiés. Alors il faut être inventif ! Plutôt que de corriger tout le mix, des outils comme la fonction "drive" du FUSION permet de remonter le RMS tout en calmant les crêtes. On arrive à ramener de la définition, de la présence et de l'intelligibilité sur un système qui aurait pu rapidement "clipper" sans ce traitement en amont. À plusieurs reprises, les ingénieurs d'accueil ont été bluffés par ce traitement du master.

 

À qui recommanderiez-vous cette console ?

Je la recommanderai à toutes les tournées au format théâtre, ou le faible encombrement est un atout, mais aussi celles où le volume de matériel transporté est limité (j'ai déjà emmené la L100 sans problème en configuration mini-bus 9 places). L'utiliser avec une configuration Dante est, en plus de la souplesse qu'offre le partage des pré-amps avec une console tierce (carte de pré-amps compensés du SB32.24), un gain de temps appréciable, la plupart des lieux étant déjà équipés de liaisons RJ45.

Il est à noter qu'avec la SSL L100, il est tout à fait possible de mixer un show complexe avec plus de 50 sources audio simultanées, sans aucune frustration.

 

Merci à Ivan Herceg pour son témoignage.

 


Pour aller plus loin : 
- L'EMC et Le Plan avec les consoles SSL Live
- SSL vous présente sa nouvelle console de mixage !

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